• Conseil d'entente : Et la parole fût !

    Depuis octobre 2012, un conseil d'entente s'est mis en place à l'école primaire des Bressons,à Salon de Provence, pendant la pause méridienne. Ce dispositif s'inspire du conseil de coopérative(méthode Freinet) et du livre de Danielle Jasmin "Le Conseil de Coopération".

    C'est un outil qui permet à l'enfant de s'exprimer et de donner son avis sur des sujets qui le concerne, (en l'occurence sur la vie dans l'école durant le temps cantine). C'est un droit qui figure sur la Convention Internationale des Droits de l'enfant (Art 12).

    230 enfants sont potentiellement concernés, mème si "seulement" 180 mangent régulièrement à la cantine.

    Le principe: Pendant la pause méridienne, des enfants-délégués mettent à disposition de leurs camarades des fiches (qui ont évolué au fil des remarques et des problèmes), pour dire ce qui ne va pas à la récré, pendant le repas. Ces billets sont ensuite affichés sur un tableau mural figurant dans la cour et sont ensuite collectés par les délégués en fin de récréation.

    Une fois par mois, le conseil des enfants se réunit pour parler des problèmes portés à sa connaissance. Ils sont assistés d'un adulte (modérateur)

    Après une saison de fonctionnement, j'ai envie de dire combien je suis heureux d'avoir vécu cette expérience. Bien sûr, cela n'a pas été toujours simple. Il y a eu quelques problèmes de fonctionnement, mais rien d'insurmontable ! Nous avons géré des démission de délégués, des messages arrachés, du matériel endommagés, des réunions houleuses,..., difficultés souvent liées à la nouveauté, à mon inexpérience en la matière et à celles des enfants qui étaient en autonomie complète une grande partie du temps.

    Au niveau des chiffres, sept réunions, plus de 240 messages affichés sur le tableau et des dizaines de conflits dont certains se sont réglés devant le Conseil dEntente.

    Laissons parler les enfants !

    Voilà ce qui s'est passé pendant toute l'année scolaire: Nous avons laissé parler les enfants, librement, sans que pèse sur eux la peur de mal faire ou plutôt de mal dire. Il y a une phrase qui résume très bien cela. Nous la devons à une petite déléguée de 8 ans qui, lors d'une réunion, a dit à une de ses camarades: "Tu sais, ici tu peux dire la vérité, on va pas te punir..."

    C'est excactement ça ! L'enfant a, peu à peu, pris confiance en la parole. Il a compris qu'elle pouvait l'aider, l'apaiser et parfois résoudre ses problèmes.

    Bien sûr, il a fallu quelquefois tempérer les débats et modérer le langage de l'enfant, comme cette fois ou un des délégués a lancé à une fille: "Si tout le monde le dit, c'est que t'es une menteuse!"

    Mais c'est ainsi que nous avons pu, après chaque incident ou difficulté de ce type, retravailler la formulation (messages clair) pour qu'elle soit moins blessante et qu'elle facilite la parole et la communication. Des travaux pratique en quelque sorte.

     

    Ce fut aussi une agréable suprise que de voir, au fil des mois, les plus grands (CM1/CM2) et de surcroit des garçons, venir au conseil pour parler de leur dispute. En effet, la plupart des messages (+ de 70%) sont écrits par des filles de CE2/CM1 !

    Un "grand de CM2 disait, lors d'un conseil: "Moi aussi, je sais écrire des messages pour le conseil !" Ce mème qui, quelque temps avant avait traité ses camarades de "Balance !", pour se rendre compte un peu plus tard qu'il fallait du courage et de l'intelligence pour venir au conseil affronter les questions parfois embarassante de ses pairs.

    J'ai en tête l'image de cette fille de 8 ans qui, ne voulant pas entendre sa camarade lui lire un reproche, s'est mis les deux mains sur les oreilles.

    Expliquer la violence, sa violence n'est pas simple et sans doute pas très confortable, sauf lorsqu'en face de vous, vous avez des enfants qui ne vous juge pas.

    Ce n'est pas un tribunal !

    Le bouche à oreille à vite fonctionné et au bout de 3 mois seulement, nous avons vu débarqué des spectateurs dans la salle du Conseil d'Entente. Ils venaient voir, écouter, peut-être se rassurer. La crainte s'est envolée avec le temps, avec les mots, les reformulations, les excuses, les réparations des uns et des autres pour laisser place à la confiance.

    La confiance, quel mot formidable !

    Mettre l'adulte en cause

    Il est arrivé que des enfants viennent parler d'un différend ou d'une altercation avec un adulte de l'école. Ils m'avaient demandé au préalable "on peut le dire si un adulte est méchant avec nous ?" Et cela s'est passé...

    Je citerai cette fois ou un enfant a laissé un message qui mettait en cause une animatrice. Rien de très grave. Lors de la réunion, je me suis engagé a aller voir la personne pour lui faire part du problème. Ensuite, l'enfant et l'adulte ont parlé(hors réunion) et le problème s'est réglé gentiment.

     

    Je tire mon chapeau à cette animatrice qui a accepté de revoir son jugement et d'analyser ses actes. Ce n'est malheureusement pas souvent le cas. L'adulte n'accepte pas facilement de devoir s'expliquer ou se justifier (pas seulement devant un enfant d'ailleurs !)

    Pourtant, si nous voulons prouver à l'enfant que la parole est bénéfique pour lui et pour les autres, nous devons montrer l'exemple en nous exposant si besoin à la critique. 

    L'exercice est d'autant plus difficile quand l'adulte n'est pas apaisé et doute de lui...

    "Que va-t-il se passer si je reconnais mon erreur ?" "De quoi je vais avoir l'air ?",etc...

    Vous voulez une réponse ? Vous ne risquez rien et mieux encore vous allez gagner le respect et la confiance de l'enfant !

    « La différence entre une critique constructive et une critique malveillante ? La première est celle que vous faites aux autres. La seconde est celle qu'ils vous font. » Frank Walsh

    Justement, des critiques !

    Elles sont venues de quelques adultes qui ont trouvé que d'afficher des mots accusateurs sur un tableau, aux yeux de tous, s'apparentait à de la délation, du voyeurisme,....

    Il est vrai que de se voir mis en cause devant tout le monde n'est surement pas très confortable. Nous avions d'ailleurs proposé, avec le tableau, une boites aux lettres ou les enfants pouvaient déposer leur billet plus discrètement.

    Notre demande n'a pas abouti. En fait, dans le projet, cet outil était d'abord destiné à garantir la discrétion du rédacteur et lui éviter des représailles éventuelles. Nous n'avons eu aucune plainte de ce genre sur l'école.

     

    Mais après toutes ces réunions, ces débats, j'ai acquis la conviction que ce tableau représente beaucoup plus que ce que j'imaginais. Celui qui veut se défendre sans violence peut le faire en écrivant un mot tout simple avec son nom, sa classe, sans juger, sans être irrespectueux. Ainsi, il exprime sa colère, sa peine et dit, en quelque sorte: STOP ! J'existe, je compte !

    Certains enfants ont mème utilisé cet outil comme moyen de pression sur leurs pairs :"Laisse-moi tranquille sinon je mets un mot au tableau".

     

    C'est vrai que le conflit se déroule ouvertement, que la violence s'affiche aux yeux de tous. Si Jonathan donne un coup de pied à Lucas et que ce dernier met un billet au tableau, ou est le problème ? Préfère-t-on que Lucas réponde plus discrètement, par la violence, dans un coin de la cour ou qu'il garde ça pour lui ? Si tu souffres en silence, ça n'embête personne...

     

    Justement, combien d'enfants souffrent en silence, moqués, harcelés par d'autres enfants ou par un adulte ? Ils aimeraient peut-être qu'on leur donne un  bout de papier et un stylo et qu'on leur disent "Ecris ce qui ne va pas..."

     

    La violence s'accomode très mal de la lumière. Elle n'aime pas être exposée aux yeux de tous. Elle déteste la discussion saine et franche. La violence vit dans le secret, dans le flou, dans l'imprecision, dans l'obscurité...

     

    A méditer...


    Soulignons aussi que nous avons eu plus de 75 remerciements affichés.

     

    Pour terminer, voici quelques messages écrits par les enfants(merci de votre indulgence), dont certains sont vraiment tout mimi !

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