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Les batisseurs de paix
La formule est belle et nous la devons à Monsieur Koïchiro Matsuura qui signe la préface d'un ouvrage intitulé "De la non-violence en éducation"écrit par Monsieur Jean-Marie Muller et publié en 2002 par l'Organisation des Nations Unis pour l'Education, la Science et la Culture.
Quelques années avant la diffusion de ce document, le 10 novembre 1998, l'Assemblée générale des Nations Unies proclamait la période 2001-2010 "Décennie internationale de la promotion d'une culture de la non-violence et de la paix au profit des enfants du monde".
Nous sommes en 2003 quand je découvre pour la première fois les textes puissants contenus dans cet ouvrage dont je n'ai cessé depuis de m'inspirer avec bonheur et surtout, avec beaucoup d'humilité.
J'ai mis du temps à saisir le message que l'auteur, Jean-Marie Muller, explicite tout au long des 70 pages de ce document. Et davantage de temps encore pour me l'approprier, si tant est que j'ai réussi à le faire véritablement.
Le message dont il est question tient en une phrase, un préalable, un principe qui donne le ton et montre la voie: "L'éducation à la non-violence commence par la non-violence de l'éducation."
Tout au long des 12 chapitres contenus dans ce document, son auteur détaille avec soin toutes les connaissances à acquérir, selon lui, pour construire une démarche éducative basée sur le respect, la tolérance, le partage et la bonté.
J’ai alors pris conscience que j’avais entre les mains un véritable mode d'emploi, une feuille de route pour agir de manière concrète et réelle en faveur de la paix et de la non-violence. Ces textes m’ont donné une motivation nouvelle et forte pour aller au-delà de ce que j’avais envisagé dans mes actions éducatives.
Et disons-le, ils m'ont transformé.
Dans ce blog je partage et commente largement mes expériences, mes tâtonnements, mes échecs et mes joies tout au long de ce sinueux cheminement vers la non-violence et la paix.
Je ne suis pas encore arrivé à bon port et je ne pense pas y parvenir un jour.
Peu importe, le chemin est riche en apprentissages et je progresse petit à petit.
Nous avons le choix
« La violence est une possibilité de la nature humaine et, en ce sens, elle est « naturelle ». Mais l’homme possède une autre possibilité qui est tout aussi « naturelle ». Cette autre possibilité est la bonté ». (Voir le texte complet ici).
Nous sommes sûrement nombreuses et nombreux à faire le choix de la bonté, de la non-violence et de la paix car nous savons combien ces valeurs sont essentielles dans notre quotidien et à quel point elles font du bien, à nous et aux autres.
À l’épreuve de la vie, il arrive malgré tout que ces bonnes intentions s’essoufflent et se perdent en chemin. Les colères, les peurs, les ressentiments, les souffrances que nous endurons sont autant d’obstacles qui peuvent nous détourner de cette bonté « naturelle ».
La violence n’exige rien, seulement que l’on laisse nos certitudes, nos préjugés, nos peurs nous envahir et prendre le dessus sur tout autre raisonnement. Quoi de plus facile ?
Se faisant pourtant, nous perdons notre exigence en un monde meilleur. Nous légitimons toutes les violences, en définitif. Car si nous renonçons pourquoi les autres ne feraient-ils pas de même?
Il n'y a pas de bonnes violences et d'autres respectables...
Résister
« Au début, je voulais changer le monde. Aujourd’hui, j’essaye que le monde ne me change pas ».
J’ai eu, il y a quelques années, une certaine réticence à m’engager dans la non-violence car je pensais, à tort, qu’elle était synonyme de passivité voire de soumission face à la violence.
En lisant Jean-Marie Muller, Lanza Del Vasto, Marshall Rosenberg et d’autres, j’ai compris combien mon interprétation des préceptes de Gandhi était aux antipodes du principe même de non-violence.
Voici un extrait choisi particulièrement éclairant à propos de la non-violence (Lanza Del Vasto) : « Jamais elle(la non-violence) ne fuit, jamais elle ne recule, jamais elle ne lâche prise, et jamais elle ne frappe. Elle riposte à chaque coup on s’offrant à d’autres coups. Elle riposte aux injures par la courtoisie... » (Lire la suite)
Non-violence rime avec résistance. C’est dans son histoire, dans son ADN !
Et la première résistance qu'elle exige est celle de résister à notre propre violence.
Le temps presse… .
« La civilisation consiste essentiellement à réduire la violence » écrit le philosophe Karl Popper »
Quand je suis dans mon petit univers, avec les enfants, je peux avoir l’impression que tout est possible, presque facile et que l’avenir n’est pas si morne que cela tant celles et ceux qui m’entourent ont une capacité de résilience, de transcendance et d’ouverture.
Quand je vois l’énergie que certains adultes déploient pour créer un climat apaisé autour de l’enfant, la patience, la bienveillance, l’ingéniosité dont ils font preuve à l’égard des jeunes pour transmettre des savoirs, des valeurs, je suis rempli d’espoir et de joie.
Mais dès que j’étends mon regard au-delà de ce monde, je sens la violence, je l'entends.
Les ressentiments se fondent, se confondent et se mélangent parfois jusqu’à se transformer en colère, en rejet, voire en haine de l’autre, une haine épaisse et compacte qui ne laisse que très peu de place au dialogue et à l’échange. Très peu de place au doute… .
Il n’y a pourtant pas de projet, pas d’avenir dans la violence, dans la haine, dans le rejet de l’autre.
On peut se laisser berner par le côté spectaculaire de la violence, par le réconfort supposé et apparent qu’elle procure. Pourtant en y réfléchissant juste un instant, sommes-nous sûr que c’est bien la violence qui permet de régler un conflit ou est-ce parce que l’autre s’est abstenu de renchérir (par peur, par humanité,...) ? Vous avez 4 heures.
« … désarmer le regard de l’enfant ».
Dans l’ouvrage « De la non-violence en éducation » il est écrit page 11(avant-propos) :
« Il s’agit d’éduquer leur regard (celui des enfants) afin qu’ils se départissent de toute hostilité envers les autres…, et qu’ils apprennent à leur égard la bienveillance. »
L’expression « désarmer le regard de l’enfant », est utilisée dans ce même paragraphe. Elle résume parfaitement, à mon sens, le travail qu’un éducateur doit entreprendre à chaque fois qu’il le peut, auprès des enfants, dans son rôle de parent, d’enseignant, d’animateur,… .
Le constat que fait Jean-Marie Muller doit nous faire réfléchir lorsqu’il écrit à ce propos :
En revanche, les situations ou l’enfant est exposé à la violence ne manquent pas. Et depuis quelques années, cette violence s'est amplifiée, transformée via les réseaux sociaux, laissant la communauté éducative souvent impuissante et dépassée par un phénomène que les pouvoirs publiques ont laissé s'installer et se développer à travers, notamment, la démocratisation des smartphones en direction des jeunes et l'accès libre à de nombreux contenus réservés aux adultes.
Si nous, les éducateurs, ne montrons pas aux enfants qu’il existe des alternatives à cette culture de la violence, comment peuvent-ils voir cette autre facette bien plus réjouissante du vivre ensemble ?
« Le ventre est encore fécond d’où à surgi la bête immonde ». Brecht
Lorsque l’on constate combien la violence gangrène les esprits sans distinction aucune, et combien ceux qui sont censés protéger la démocratie – nos responsables politiques – attisent les préjugés, les rejets de l’autre, le racisme, l’antisémitisme et le repli sur soi, il est urgent de trouver des moyens d’agir, chacune et chacun, à son humble niveau, en semant des graines de paix et d’amour dans le coeur des enfants.
Car la paix se construit chaque jour, chaque instant et n’est jamais chose acquise.
L'ouvrage de Jean-Marie Muller nous aide à formaliser toutes nos bonnes intentions, à les mettre en application et à transmettre aux enfants l'espoir d'un avenir meilleur.
Si nous ne le faisons pas pour nous, faisons-le pour eux.
Une chanson pour vous encourager :-)
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