• La sanction pour rester dans la non-violence

    Comment réagir quand un enfant n'obéit pas, lorsque l'on est un animateur, un enseignant, un parent qui ne souhaite pas se laisser emporter par la violence? Dans ces moments ou l'enfant peut sembler "hors de contrôle", que peut-on faire pour le ramener à la raison ?La sanction pour rester dans la non-violence

    Par expérience, à chaque fois que je me suis retrouvé dans ce type de situation, hormis les techniques de gestion des conflits qui consistent essentiellement à garder son calme et à utiliser un langage adapté, ce qui m'a aidé c'est le cadre que j'avais mis en place et que les enfants connaissaient (les règles, les droits, les devoirs, les sanctions). Ainsi l'enfant ou les enfants qui dépassaient les limites savaient qu'il y avait des conséquences à leurs actes.

    Il m'a également été utile d'appliquer différents niveaux de sanctions pour éviter d'enfermer l'enfant dans la démarche jusqu'au-boutiste de celui qui n'a plus rien à perdre. Pour illustrer mes propos, voici une petite histoire:

    Le contexte: Sortie de centre aéré, un groupe d'une trentaine d'enfants de 12 à 15 ans circulent sur le trottoir, encadrés par 3 animateurs. Une dispute éclate entre 2 jeunes et le début d'une bagarre s'amorce. Un animateur s'interpose. Il demande des explications aux 2 protagonistes qui continuent à se pousser et à s'insulter. L'animateur se place entre les 2 et prévient: Vous voulez quoi ? prendre chacun une sanction niveau 3 pour bagarre ou que l'on règle le problème en parlant (le niveau 3 signifiait dans ce cas, pas d'activité pendant un temps et appel aux parents)?

    Les enfants s'adressent enfin à l'animateur s'accusant mutuellement (un classique). L'un semble vouloir calmer le jeu mais l'autre s'enflamme et balance une insulte à l'autre. L'animateur s'approche et dit à l'auteur de l'injure: Tu es sanctionné niveau 2 ( pas d'activité pendant un temps), tu veux passer au niveau 3 ou alors on se parle ? Je vous passe les détails de la discussion qui a suivi...

    Dans ce type de situation,  sans un cadre préparé, difficile de ramener les enfants à la raison si l'on a fait le choix d'une éducation non-violente. D'autres diront qu'une "bonne engueulade" voire quelques gestes menaçants (et plus si besoin) suffisent pour que tout rentre dans l'ordre. C'est un point de vue que je ne partage pas.

    Si j'en viens à utiliser la violence verbale ou physique, je ne me sens plus du tout crédible au regard des enfants à qui je demande de se contrôler et de ne pas utiliser la violence. De plus je rentre dans une escalade dangereuse de la violence et personne ne peut savoir à l'avance ou cela peut mener. Dernier point, en agissant ainsi, je clos l'incident sans prendre en compte la colère des protagonistes et ses conséquences.

    Bien sûr cette démarche non-violente et éducative s'anticipe avec les enfants et dans ce cas, avec les parents qui sont informés au préalable des sanctions qui peuvent être appliqués si leur enfant se montre peu coopératif.

    Autre exemple avec une enfant de 4 ans et une Mamie: Crise de nerf de la petite fille quand sa grand-mère lui demande de venir faire sa toilette. L'enfant crie, s'énerve, se met à courir et utilise un ton très dur envers la pauvre mamie quelque peu désappointée. Après un début de négociation, Mamie sent monter la colère. Elle s'approche alors de l'enfant et lui dit:

    -Bon puisque tu ne veux pas m'écouter, je vais t'enlever un droit.

    L'enfant se met alors à crier de plus belle, "non, non!".

    -Si tu continues à crier tu vas perdre 2 droits.

    L'enfant se calme peu à peu...

    La grand-mère explique ensuite à l'enfant qu'elle est très en colère quand elle voit sa petite fille réagir ainsi. Elle lui demande de choisir un droit qu'elle accepte de perdre en lui disant que la prochaine fois, c'est Mamie qui choisira. L'enfant s'exécute, fait un câlin à sa grand-mère et file faire sa toilette.

    Comment cela est-il possible ? Tout simplement parce que la Mamie a préparé le terrain.

    Avec sa petite fille, elles ont fait des étiquettes à partir de tout ce que l'enfant aime faire dans la journée. Au total 7 ou 8 étiquettes que l'enfant a pris le soin de colorier et de coller sur le frigo. L'enfant est prévenu: Quand il n'en fait qu'à ta tête, il risque de perdre des droits.

    Ainsi pas d'emportement, pas de violence envers l'enfant, mais de la bienveillance et de la fermeté.

    Je pourrais vous citer des dizaines d'exemples ou ce procédé "droits et devoirs" a permis de désamorcer des situations très difficiles.

    Mais parfois, il y a urgence.

    Doit-on pour autant renoncer à la non-violence ?

    En ce qui me concerne, dans les cas extrêmes, lorsqu'il s'agit d'empêcher un enfant de faire mal ou de se mettre en danger, j'utilise la force, mais pas n'importe quelle force, une force protectrice (comme la nomme dans son livre Marshall Rosenberg ). Mon intention n'étant pas de brutaliser l'enfant ou de passer ma colère sur lui mais bien de l'empêcher d'agir contre son bien et celui des autres.

    DansLa sanction pour rester dans la non-violence ce type de situation, la force protectrice permet de contraindre l'enfant sans pour autant vouloir lui faire mal. Durant ce temps ou l'enfant peut se montrer parfois très menaçant, l'adulte garde son calme et tente de maintenir le dialogue et de rassurer l'enfant. Il n'applique pas une force répressive pour bloquer l'enfant mais plutôt une contrainte douce et bienveillante  (quitte à être malmené par l'enfant à qui il n'opposera aucune riposte).

    L'important dans ces situations est de proposer, dès que cela est possible, une solution de sortie à l'enfant tout en l'informant de la gravité de ses actes et des conséquences qu'il encoure.

    Autre détail important, dans le milieu professionnel, la force protectrice ne peut s'appliquer qu'aux yeux de tous (devant d'autres adultes et enfants). On ne se cache pas, on ne tente pas de feindre ou de dissimuler ses intentions, on explique clairement ce que l'on fait et pourquoi on le fait.

    Exemple: Un enfant frappe un autre enfant, menace l'animateur et tente d'escalader les grilles de l'école. L'animateur intervient pour faire cesser l'agression et pour empêcher le fauteur de trouble de se blesser. Il utilise alors la force pour protéger les enfants.

    Toutefois, il faut savoir que cette méthode d'intervention d'urgence qui doit rester exceptionnelle(parce qu'éprouvante pour l'enfant et l'adulte), demande une préparation minutieuse autant technique que mentale.

    Techniquement je dois savoir comment maintenir un enfant sans le blesser ni l'oppresser, et mentalement je dois être prêt à encaisser la violence physique ou verbale de l'autre et savoir quand je dois lâcher prise (pour me protéger ou pour ne pas faire mal). Le but étant, rappelons-le, d'empêcher l'enfant de faire mal aux autres ou de se faire mal et non de se venger ou de mater l'enfant rebelle.

    De mon point de vue, cela n'est possible que lorsque l'on a sincèrement renoncé à toute idée de violence envers l'enfant.

    La sanction conçue ainsi peut permettre d'éviter l'accumulation de peines qui sont souvent infligés aux enfants désobéissants. La sanction se suffit à elle-même sans y ajouter des cris, des humiliations, des brutalités. L'enfant qui commet des violences reste un enfant avec des droits et si nous adultes nous ne parvenons pas à montrer du haut de notre expérience et de nos fonctions que nous sommes capables de respecter l'enfant (dont l'attitude nous dérange), comment espérer qu'un enfant soumis à des moqueries, des coups puissent ne pas sombrer à son tour dans la violence ?

    La violence est un échec, un aveu d'impuissance, une légitimation de toute forme de violence. Pourtant, je suis convaincu que nul n'est à l'abri de se laisser emporter par la violence. La fatigue, l'accumulation de contrariétés, de frustration, de déception peuvent fragiliser l'adulte. Ce qui pourrait d'autant plus nous rendre indulgent et tolérant avec celles et ceux (et notamment avec les enfants) qui, un jour se laisse entrainer dans le cercle vicieux de la violence.

    Mais je crois sincèrement que si je cesse de considérer la violence comme une option, une possibilité pour régler mes problèmes, si je développe d''autres stratégies pour me prémunir, alors j'augmente mes chances de lui résister...

    Disons-le clairement et sans hésiter: La violence n'est pas la solution, c'est le problème...

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